Il y a quelques mois, j’ai eu le plaisir et le privilège de passer un temps de partage avec lui où nous avons pu échanger en toute amitié. Sa maladie lui avait offert un moment de répit et il était très enjoué et dynamique. Je m’intéressais d’abord à sa personne, mais j’étais curieux de connaître son parcours et son regard sur la Ligue telle qu’il l’avait connue. Ce que j’ai envie de transmettre aujourd’hui, ce sont quelques paroles qu’il m’a communiquées en lien avec ses engagements dans le cadre de la Ligue pour la lecture de la Bible.
Dénotant un réel esprit pionnier, Danilo dit : « Nous, on était au Québec, mais quand j'ai terminé là-bas où mon but était de mettre une équipe en place comme je l’avais fait au Congo (RDC), alors j'ai dit : « moi là, j'arrive au bout, je m'en vais ». »
Puis il rajoute : « Donc une année avant que je parte, Paul Clark, secrétaire des Amériques qui passait à Montréal pour nous saluer, me dit : « tu as vu cette annonce de l’international pour les ministères bibliques ? C'est exactement un travail pour toi, tu es vraiment la personne pour ça ! Tu étais en Afrique, tu as été en Europe, en Amérique du Nord, c'est fait pour toi. » Alors j’ai postulé et ma candidature a été retenue. Pour ce poste, la Ligue voulait un spécialiste de la Bible, et quand ils ont vu ma candidature, ils l’ont acceptée. Ils se sont dit que ce ne serait pas un docteur, mais un coordinateur de ce qui se fait déjà. Ce n'est pas moi qui allais insuffler de nouvelles idées n’étant pas théologien du tout. Maurice Ray m'avait transmis cette importance de la parole qui fonde : « Dieu parle et la chose existe ». J’ai donc milité partout pour cela : « Permettez à Dieu de vous parler le matin et votre vie sera ; et vous existerez. » Ce sont les trois points de la méthode de la Ligue : l’Observation, puis l'Interprétation et ensuite seulement l'Application. Tu vois en Afrique, dans ces groupes que nous avons créés, c'est parti très fort sur « le vent souffle » et c'était axé sur la prière. Dans nos groupes, c'étaient tous des catholiques avec les prêtres et les Jésuites, et moi j’insistais toujours pour dire : « En premier, il faut une parole, la parole créatrice doit être là, au début. »
Danilo a également été touché par l'ouverture des républiques ex-soviétiques. Un des grands temps de la Ligue où l’on pouvait collaborer avec toutes les Églises : « C'était après la chute du mur de Berlin, juste après 1989, je terminais au Québec et j'étais engagé pour l’international. On était sur la plage à Cuzco au camp de la Ligue au Pérou, on se promenait sur la plage, Nigel Sylvester et moi, au centre de la Ligue au bord de l’océan Pacifique, c'est magnifique, puis il m’a dit : « Donc tu as une responsabilité sur le travail international et tu te rends compte de ce qui se passe en Russie, est-ce que ça t'intéresserait qu'on mette un accent fort là-dessus ? » J'en avais rêvé toute ma vie de la Russie, ma grand-mère travaillait là-bas, alors j'ai tout de suite dit : « Mais il n’y a aucun doute ! Moi ça me passionnera d'aller voir ce qui s'est passé avec la Bible dans ces pays-là alors que c’était interdit. Quand j'ai commencé à aller mettre mon nez en Russie pour rencontrer les gens et lire la Bible avec eux, j'allais dans tout ce qui bougeait et partout déjà, ils lisaient la Bible, et moi, je leur posais des questions sur leur vécu. Qui sommes-nous, nous les Occidentaux, pour dire aux Russes ce qu'ils doivent croire alors qu'ils ont souffert pour leur foi ? »
Enfin, Danilo avait un amour pour la liberté, il a dit : « Pour moi, le succès étonnant de la Ligue en Suisse romande est venu de cet esprit d'autonomie que les Anglais avaient insufflé dans le mouvement et permettait à chaque pays de se développer à sa façon, selon ce qui convenait aux Églises du pays, et ça, c'est une grande force. »
Et finalement, Danilo avait un attachement pour le campus, pas pour les bâtiments mais plutôt pour l’esprit qui s’y était développé et qui lui a toujours tenu à cœur : « Vennes était un endroit ouvert… quand tu relis les documents historiques de la Ligue, j'ai juste sorti les meilleurs avant notre discussion, ce que le secrétaire international avait demandé, à l’époque, c'était l'ouverture à toutes les dénominations. »
Je conclus en exprimant simplement ma gratitude pour les temps passés en sa compagnie, pour ses encouragements à mon égard et pour la profondeur de son regard empreint d’amitié.
Pascal Grosjean